Un Café Racer, c'est quoi ?

Il doit y avoir autant de définitions qu'il y a de motards sur terre. Par essence, c'est une moto customisée, donc personnalisée, et il ne devrait pas y en avoir deux identiques. C'est donc très dur à définir, même si, à mon sens, il y a des points communs à tous les Café Racers.

Je vais donc essayer d'expliquer comment je vois le Café Racer. C'est une description qui est sûrement discutable, mais c'est la mienne, et elle n'engage que moi.

Un peu d'histoire

Le Café Racer a ses origines au Royaume Uni des années 60. A cette époque, les jeunes travailleurs proche de la culture Rock'n Roll, transformaient leurs motos pour les rendre plus rapides et plus maniables. Ils organisaient des courses entre eux, qui consistaient à faire un aller-retour entre un café et une destination déterminée, assez vite pour que la chanson jouée sur le juke-box ne soit terminée quand le pilote revenait. De plus, pour ne pas altérer leurs sens pendant la conduite, ils préféraient boire un café plutôt qu'une bière ou autre boisson alcoolisée. (source : wikipedia)

Donc un Café Racer est une moto du commerce que l'on transforme pour être plus performante, plus maniable, au détriment du confort.

Le concept

La principale caractéristique du Café Racer est d'être allégé au maximum. On supprime de la moto tout ce qui n'est pas utile à son fonctionnement. Exit donc tous les carénages et tous accessoires de confort. On remplace souvent la selle biplace par une monoplace avec un cul de selle arrondi, ou le réservoir acier par un réservoir alu de petite capacité et plus léger, bref, on gagne du poids que tout ce que l'on peut. On ne garde sur un Café Racer que ce qui permet à la moto d'avancer, de s'arrêter et de de maintenir sur la route (plus les organes de sécurité tels que l'éclairage, la signalisation, etc., mais réduits à leur plus simple expression)

La performance

Bien sûr, à l'époque, certains préparaient aussi leur moteur pour augmenter encore les performances de leur machine. Il faut bien avouer que c'est très rare dans les Cafés Racers de nos jours. Peu s'attaquent au moteur lui même, et au mieux, on met des filtres à air coniques et des collecteurs 4-en-1 sur les 4 cylindres pour gagner un peu de couple, mais rarement plus.

Donc n'ayons pas peur de l'avouer, le Café Racer aujourd'hui est plus une affaire de look que de performance, même si en respectant la règle du dénuement de la moto, on l'allège, et on la rend donc de fait un peu plus performante et plus maniable.

Le design

Comme dit plus haut, l'essence même de ces motos, c'est qu'il n'y a pas de règle, tant que ça marche fort. Cependant, comme aujourd'hui c'est plutôt le look du Café Racer que l'on recherche, je pense que bien travailler sur le design est important pour que la moto soit, en plus, agréable a regarder.

Il n'y a qu'à parcourir le web pour s’apercevoir que bon nombre de Café Racers sont, à mon sens, ratés. Ils ont bien tout ce qui fait un Café Racer, mais il ne ne sont pas beaux. En effet, comme pour le nombre d'or en architecture ou la règle des 2/3-1/3 en photo ou en peinture, il y a des règles de design à respecter pour que notre œil trouve un objet joli, et à fortiori une moto. Après, bien sur, tout est une histoire de goût, et là encore, cette opinion n'engage que moi. 

Je suis tombé il y a quelques temps sur cette page internet d'un designer américain, qui entretient, parallèlement à son métier de designer de voitures, un grand intérêt pour le Café Racer. Et ce qu'il dit est extrêmement intéressant, et très instructif. Pour quelqu'un comme moi qui n'est pas très créatif, au sens artistique du terme, les règles de design qu'il décrit seront des guides précieux pour la réalisation de mon Café Racer, que je veux personnel, mais aussi réussi visuellement.

En outre, son exemple me parle, car le Café Racer qui illustre son discours est fait sur une base de Honda 500 CX, une moto qui me tient particulièrement à cœur car c'est la seule et unique moto que mon père ait jamais possédé, et à l'arrière de laquelle je montais ado, dans les années 80.

Les règles du design d'un Café Racer

Voici un résumé en Français de la page citée plus haut.

Le fondement

Le Café Racer est définit par une ligne horizontale qui va de l'avant à l’arrière de la moto. Elle suggère la vitesse et la rigidité. C'est la première ligne que l’œil voit et c'est elle qui va guider le regard le long de la moto. Il est préférable que cette ligne soit ininterrompue.

Cette base puissante repose sur deux roue de dimensions quasiment identiques.

Les lignes de rupture

Ces lignes perpendiculaires au sol passent par le centre des roues. Toute partie de la moto qui dépasserait ces lignes la rendrait bizarre à regarder. Trop à l'arrière, et la moto aurait l'air mal équilibrée, trop lourde sur l'arrière, et mal conçue. Pareil pour l'avant. Cependant, ce n'est pas grave si on dépasse un tout petit peu ces lignes, comme sur l'exemple ci-dessous. Mais on dit bien "un tout petit peu". Il n'y a rien de pire qu'une selle et un cul trop longs et qui font un porte à faux affreux à l'arrière de la machine (ce que l'on voit trop souvent). Pareil pour le garde-boue avant, il faut que son extrémité antérieure se rapproche le plus possible de la ligne de rupture.

La limite haute

Cette ligne est aussi importante que les lignes de rupture. Elle donne à la moto son look "aplati". Elle passe par le point le plus haut du réservoir, et tout élément qui la dépasserait de trop cette ligne retirerait au Café Racer son aspect lisse et efficace. Combinée aux lignes de rupture, elle crée un rectangle imaginaire dans lequel doivent se trouver tous les élements majeurs du design.

La colonne vertébrale

Extrêmement importante, cette ligne passe par le point le plus large du corps de la moto. Elle va définir la position du phare, du réservoir, et de la selle. Ici, le centre du phare est pile-poil sur la ligne, ce qui est un excellent choix. Le réservoir et la selle tombent parfaitement sur cette ligne.

Dans le design de véhicules, c'est la ligne le plus importante, et s'il y a une chose à ne pas rater, c'est bien cette ligne. Elle donne à la moto sa cohésion visuelle, et nous fait comprendre immédiatement que ce n'est pas juste un ensemble de pièces assemblées entre-elles.

Le poids visuel

C'est dans cette zone que se situe la masse principale de la moto. Elle contient le moteur, avec cylindres, boite, carbus, etc. et tout ce qui se trouve dans la moitié antérieure du cadre. C'est ce qui va définir la taille et la position du réservoir, qui doit aussi de trouver contenu parfaitement dans cette zone. Un réservoir qui dépasse ces lignes donnera un aspect lourdaud à la moto, un réservoir trop petit donnera l'impression que la moto a grandi sans lui (un peu comme sur la bobbers)

Deuxièmement, et tout aussi important, l'axe du poids visuel. Cette ligne passe par le milieu du moteur et l'axe des cylindres. Elle va définir la forme idéale du réservoir, dont le point le plus haut passer par cette ligne, ou au moins en être le plus proche possible. Cette règle va donner un aspect sportif et robuste à la moto.

Cette règle s'applique aussi aux 4 cylindres en ligne des japonaises, inclinés vers l'avant. La ligne passera aussi par le centre du bas moteur et des cylindres, mais sera inclinée. Ainsi, on recherchera un réservoir dont le point haut sera très en avant, et dont la courbure tombera vers l'arrière.

Kawaski Zephyr 550

(l'exemple ci-dessus n'est pas dans la page originale, c'est moi qui l'ai ajouté pour illustrer ce propos)

La descente

C'est la courbe de chute vers l'arrière. Idéalement, le réservoir et le cul de selle doivent donner l'impression qu'ils font partie du même ensemble, et leurs lignes doivent suivre la même courbure. Un peu comme si originalement ça avait été la même pièce qui aurait été coupée au milieu pour laisser place à la selle du pilote. Respecter cette règle va procurer à la machine un aspect resserré et cohérent, et que cette courbe est intentionnelle.

Les angles principaux

Si les différentes lignes de la machine diffèrent des angles primaires (fourche, amortisseurs, etc.), on se retrouve vite avec un plat de spaghettis sans cohésion, ce qui ruinera tous les efforts que l'on aura faits pour respecter les autres règles. Il faut les prendre en compte, surtout si on ajoute de nouvelles pièces, si on transforme la structure de la moto. Ici, la moto a un cadre arrière fait maison, et le constructeur a intelligemment repris l'angle de la fourche, donnant un aspect cohérent à l'ensemble.

Les angles secondaires

Même dans des zones plus réduites, le constructeur a su rendre des lignes secondaires de la moto parallèles entre elles : le phare et la ligne avant du cadre, les silencieux d'échappement et la remontée du cul de selle.

La longueur de fourche

Il faut essayer de garder la roue avant le plus possible vers l'intérieur de la moto.

(note personnelle : c'est certainement ce sur quoi il va être très difficile de jouer, l'angle de chasse étant défini par la colonne de direction sur le cadre, et ne peut être modifié facilement (et je le déconseillerais de toutes façons). Il faut donc soit changer de fourche pour une plus courte, soit jouer sur la hauteur des tés de fourche. Mais sans adapter la suspension arrière à la hauteur de l'avant, ce qui n'est pas forcément possible, on risque de ne plus avoir une ligne principale parfaitement horizontale. Donc à mon avis, les marges sont très minces pour suivre cette règle.)

Conclusion

Comme le dit l'auteur de cet article : "J'ai vu des motos qui respectent ces règles à la lettre et qui sont magnifiques. J'ai vu des motos qui ne les respectent pas, et qui sont aussi formidables." Ces règles sont une base pour savoir sur quoi travailler principalement, et comprendre pourquoi une moto a le look qu'elle a. Une fois conscient de ces règles, libre à chacun de les suivre ou au contraire, de les casser.

A titre personnel, je pense que les règles de design qu'il décrit définissent très bien ce à quoi doit ressembler un Café Racer, si tant est qu'il puisse y avoir des règles.

Je me fais donc miennes ces règles qui me guideront dans le remontage de ma moto en Café Racer.